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Midi-Pyrénées / Languedoc-Roussillon
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| 1/09/2015

Jean-Luc Moudenc : « Toulouse et Montpellier seront les deux moteurs de la croissance régionale »

Ré­gio­nales, ses liens avec Phi­lippe Sau­rel, sa ville… Jean-Luc Mou­denc se livre à La Lettre M.

On at­ten­dait pour juillet la dé­ci­sion du gou­ver­ne­ment sur la DUP de la ligne à grande vi­tesse Tou­louse-Bor­deaux (après avis dé­fa­vo­rable des com­mis­saires en­quê­teurs fin mars, NDLR). Rien n’est tombé…
Le gou­ver­ne­ment s’est ac­cordé quelques se­maines de plus. C’est un pro­jet struc­tu­rant de l’ave­nir. Tou­louse n’est pas des­ser­vie par une ligne à grande vi­tesse. Il est im­pos­sible de pré­tendre à un rang de mé­tro­pole eu­ro­péenne en étant tenu à l’écart du ré­seau fer­ro­viaire à grande vi­tesse !

Et plus au Sud ?
A par­tir du mo­ment où TGV ar­rive à Tou­louse, il faut que le tron­çon man­quant entre Tou­louse et Nar­bonne soit réa­lisé . L’Etat fait le choix de créer une nou­velle ré­gion, avec deux mé­tro­poles dis­tantes l’une de l’autre de 240 km. A l’Etat d’avan­cer et de trou­ver des so­lu­tions. La lo­gique éco­no­mique, c’est de prio­ri­ser le lien entre Tou­louse et Mont­pel­lier. Sinon, la fu­ture ré­gion ne fonc­tion­nera pas bien.

Avec Phi­lippe Sau­rel, vous êtes très dif­fé­rents…
(sou­rire) C’est vrai. Je suis so­li­daire de ma fa­mille po­li­tique, lui est in­dé­pen­dant… ce qui ne me sur­prend pas main­te­nant que je le connais mieux ! Il est can­di­dat aux élec­tions ré­gio­nales, pas moi. Je suis de la terre, il est mé­di­ter­ra­néen. Et nos sen­si­bi­li­tés po­li­tiques sont dif­fé­rentes. Mais nous avons aussi des points com­muns : la pas­sion pour notre ville (tous deux sont na­tifs de la ville dont ils sont maires, NDLR) ; une vi­sion du rôle des mé­tro­poles, qui concentrent les pro­jets les plus in­no­vants, les plus créa­teurs d’em­plois. Il est clair que les mé­tro­poles de Tou­louse et de Mont­pel­lier se­ront les deux mo­teurs de la crois­sance de la fu­ture grande ré­gion. Autre point com­mun : notre goût pour l’his­toire, ce qui in­tro­duit un peu de re­la­ti­vité sur les évé­ne­ments du mo­ment et donne du sens à cer­taines orien­ta­tions.

Com­ment sen­tez-vous les élec­tions ré­gio­nales des 6 et 13 dé­cembre ?
Très ou­vertes ! Plus qu’on ne le croyait. Quand un sor­tant ne se re­pré­sente pas, et le plus évident à gauche était Mar­tin Malvy, le jeu est ou­vert. La can­di­date so­cia­liste (Ca­role Delga, NDLR) est très très loin (sic) d’avoir l’étoffe de Mar­tin Malvy. Elle est contes­tée dans son parti, et dans son camp. Elle n’est pas re­con­nue par l’opi­nion. Le pay­sage po­li­tique est très éclaté. Il y a une grande in­cer­ti­tude sur le ré­sul­tat final. De plus en plus de gens, dans cette ré­gion, et mal­gré la force de la tra­di­tion so­cia­liste, veulent es­sayer autre chose.

Do­mi­nique Rey­nié, le can­di­dat LR, ne fait pas l’una­ni­mité au sein de votre camp.
Il n’ap­par­tient pas au sé­rail, est issu de la so­ciété ci­vile, n’est pas un grand baron de la po­li­tique en LR et MP. Alors, for­cé­ment, il s’est trouvé un peu contesté. Mais il est da­van­tage en phase avec l’opi­nion pu­blique, qui veut du re­nou­veau. Un mes­sage à ceux qui ont ma­ni­festé des hu­meurs dans ma fa­mille po­li­tique : à l’heure de la ren­trée, je sou­haite qu’ils rentrent dans le rang, qu’ils fassent pré­va­loir l’in­té­rêt gé­né­ral de la fa­mille, plu­tôt que de se ré­pandre en dé­cla­ra­tions per­son­nelles. On a de vraies chances. Ça va se jouer à peu. Tout le monde doit donc être uni. Des dé­fec­tions peu nom­breuses peuvent suf­fire à faire bas­cu­ler le scru­tin.

Dans ce contexte, un can­di­dat dis­si­dent comme Phi­lippe Sau­rel a-t-il une chance ?
Vu la dé­fiance à l’égard des forces po­li­tiques clas­siques, une sen­si­bi­lité in­dé­pen­dante comme la sienne peut per­cer. De là à dire qu’il sera le futur pré­sident de Ré­gion, je ne fran­chi­rai pas le pas ! Peut-être que son ob­jec­tif est de peser sur l’iden­tité du futur pré­sident de Ré­gion, à dé­faut de l’être lui-même. En tout cas, il dé­fend avec plus de sub­ti­lité les in­té­rêts de Mont­pel­lier que le pré­sident sor­tant du conseil ré­gio­nal du LR (Da­mien Alary, NDLR) dé­fend sa propre ré­gion. Ce der­nier s’est em­pê­tré avec le PS dans cette la­men­table af­faire de la pré­si­dence dé­lé­guée. Ça montre que le PS et le PRG sont dé­con­nec­tés de la réa­lité. Ils n’ont pas com­pris que les élec­teurs sont écoeu­rés par ces pra­tiques : on se ré­par­tit les postes avant le vote, et quand les postes n’existent pas, on les crée par une loi. Cette af­faire de pré­si­dence dé­lé­guée va peser beau­coup, et peut mener à sa perte la liste PS/PRG.

Re­ve­nons sur la hausse des im­pôts lo­caux à Tou­louse (15 % à la Ville et 15 % en deux ans à la Mé­tro­pole), an­non­cée puis votée au prin­temps. Vous vous étiez en­gagé à ne pas les aug­men­ter. Pas de re­gret ?
La vie po­li­tique consiste à prendre des dé­ci­sions à par­tir des dé­ci­sions des autres. La baisse de cré­dits aux col­lec­ti­vi­tés dé­ci­dée par l’Etat, conju­guée à la ges­tion mu­ni­ci­pale tou­lou­saine pré­cé­dente, où l’épargne fut an­ni­hi­lée, m’a mis en dif­fi­culté sitôt élu, et m’a fait prendre une dé­ci­sion que je ne vou­lais pas prendre. Elle est prise, je l’as­sume. Cette hausse de fis­ca­lité va gé­né­rer 30 M€ de re­cettes par an pour la col­lec­ti­vité. Ca ne com­pense pas to­ta­le­ment les pertes liées aux baisses de do­ta­tion. Mais en cas de sta­bi­lité fis­cale, nous au­rions di­visé par deux l’in­ves­tis­se­ment et n’au­rions fait que de l’en­tre­tien !

Quels ef­forts d’éco­no­mie pro­duit votre col­lec­ti­vité ?
Plu­sieurs le­viers sont ac­tion­nés : di­mi­nu­tion du nombre d’em­bauches, non rem­pla­ce­ment des dé­parts en re­traite – ce qui ne s’était ja­mais fait avant à Tou­louse ! La masse sa­la­riale Ville / Mé­tro­pole a aug­menté d’1,5 % sur le 1er se­mestre 2015, au lieu de 6 % lors du 1er se­mestre 2014 : on a ra­lenti une ma­chine qui chauf­fait trop. Les ta­rifs des ser­vices pu­blics ont été ma­jo­rés pour se rap­pro­cher de la réa­lité du coût, et les sub­ven­tions (50 M€ en­vi­ron Ville + Mé­tro­pole chaque année) ont di­mi­nué. C’est un ef­fort de long terme. Trans­for­mer un outil aussi lourd, aussi com­plexe, qu’une grosse col­lec­ti­vité lo­cale, ne se fait pas en un exer­cice bud­gé­taire. Cette mu­ta­tion de la façon de fonc­tion­ner s’achè­vera en fin de man­dat.

La nou­velle grande ré­gion va exis­ter, po­li­ti­que­ment et pour les dé­ci­deurs. Mais le sen­ti­ment d’ap­par­te­nance ne va-t-il pas faire dé­faut ?
Je ne pense pas. Cette grande ré­gion re­prend à 80 % les fron­tières de l’an­cien comté de Tou­louse. Au-delà des siècles qui s’écoulent, il y a des per­ma­nences his­to­riques, éton­nantes . Cette fu­ture grande ré­gion a une cer­taine unité cultu­relle, et donc iden­ti­taire. A quelques ter­ri­toires près, elle n’est pas si hé­té­ro­clite que ça.

Qui sou­tien­drez-vous aux pri­maires des Ré­pu­bli­cains ?
Je ne sou­haite pas, pour l’ins­tant, ap­por­ter mon sou­tien à telle ou telle per­sonne. Je me pro­non­ce­rai en temps voulu. Ce pro­ces­sus dé­mo­cra­tique (déjà ini­tié en LR et MP, avec des pri­maires ayant dé­si­gné Do­mi­nique Rey­nié en avril der­nier à Sète, NDLR) m’en­thou­siasme : la plu­ra­lité de can­di­dats qui se des­sine sera un vé­ri­table atout pour construire l’al­ter­nance en 2017.

Où avez-vous passé vos va­cances d’été ?
Avec ma femme et mes deux filles, nous avons sillonné la côte ouest des Etats-Unis. Les pay­sages, ur­bains ou na­tu­rels, ont été une source d'émer­veille­ment. Leur im­men­sité et leur beauté nous ont fas­ciné. Le sen­ti­ment de grande li­berté qu'ils dé­gagent res­tera un sou­ve­nir mar­quant.

Ses gros dos­siers écos

. TAE (Tou­louse Ae­ros­pace Ex­press) : « la prio­rité de mon man­dat ». Pro­jet de 3ème ligne de métro, au stade des études de tracé et d’im­pact. Coût es­ti­ma­tif : entre 1,5 et 1,7 Md€. Le tracé et l’em­pla­ce­ment des sta­tions se­ront ar­rê­tés en fin d’an­née en vue d’une concer­ta­tion l’an pro­chain. Mise en ser­vice pré­vue au mieux en 2024.
. PEX (Parc Expos) : pro­jet de nou­veau Parc Expos, à Beau­zelle (nord-est). Entre 300 et 400 M€. Dis­cus­sions en cours avec les trois par­te­naires fi­nan­ceurs (consor­tium chi­nois ex­ploi­tant l’aé­ro­port de Bla­gnac, Ré­gion MP et conseil dé­par­te­men­tal 31), pour confi­gu­rer la taille du pro­jet et dé­fi­nir les mo­da­li­tés de des­serte (route, tram­way). « Un ar­bi­trage dé­fi­ni­tif aura lieu avant la fin de l’an­née. » La DUP est si­gnée. Ac­qui­si­tions fon­cières en cours de fi­na­li­sa­tion. Deux ans de tra­vaux.
. TESO (Tou­louse Euro Sud Ouest) : pro­jet de quar­tier d’af­faires et de com­merces au­tour de la gare Ma­ta­biau. Pi­loté par Eu­ro­po­lia, pour le compte de Tou­louse Mé­tro­pole.
. GPSO (Grand Pro­jet du Sud-Ouest) : pro­jets de LGV Bor­deaux-Es­pagne et Bor­deaux-Tou­louse. Sou­tenu par les quatre grands élus du Sud-Ouest : les pré­si­dents PS des ré­gions Aqui­taine (Alain Rous­set) et MP (Mar­tin Malvy) et les maires LR de Bor­deaux et Tou­louse Alain Juppé et Jean-Luc Mou­denc.

Bio Ex­press

Né le 19 juillet 1960 à Tou­louse, dans le quar­tier Saint-Cy­prien. 55 ans.

Marié de­puis 1990 à Blan­dine Roman. Deux filles : Es­telle, née en 1991, et Amé­lie, née en 1997.

. Elu maire de Tou­louse le 30 mars 2014, où il prend sa re­vanche face au so­cia­liste Pierre Cohen, maire sor­tant, qui l’avait battu d’une courte tête en 2008. Pré­sident de Tou­louse Mé­tro­pole et de l’AMGVF, As­so­cia­tion des Maires de Grandes Villes de France. L’AMGVF va fu­sion­ner avec l’as­so­cia­tion des com­mu­nau­tés ur­baines de France cet au­tomne. Il va prendre la pré­si­dence de la nou­velle en­tité, « re­pré­sen­tant 29 mil­lions de Fran­çais ».

En chiffres

Il y a 12 400 agents (per­ma­nents et non per­ma­nents) à la Ville de Tou­louse et à Tou­louse Mé­tro­pole

453 317 ha­bi­tants à Tou­louse selon le der­nier re­cen­se­ment de 2012.

727 016 ha­bi­tants dans les 37 com­munes qui com­posent Tou­louse Mé­tro­pole

Bud­gets : 799 M€ pour la Ville de Tou­louse (bud­get pri­mi­tif 2015) et 1,4 Md€ pour Tou­louse Mé­tro­pole.

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