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| 30/08/2018

Ce qu’il faut retenir des discours inauguraux de l’Université d’été du Medef

La Lettre M était présente à la 20e Université d’été du Medef (HEC Paris), le 28 et 29 août, où une grosse délégation régionale d’entrepreneurs était présente (présidente du Medef Occitanie : Sophie Garcia). Retour sur les points forts des discours inauguraux du nouveau président du Medef national, Geoffroy Roux de Bézieux, et du Premier ministre, Édouard Philippe, le 28 août.

Geoffroy Roux de Bézieux : « L’initiative est du côté de la sphère privée »

« Il y a 20 ans, il y avait 3,6 % de croissance annuelle en France, moins de 5 % de Français avait Internet, et le fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, était encore au collège. Vingt ans après, l’Europe a montré sa solidité. Mais les enjeux sont multiples : modèle européen, urgence environnementale et climatique, raréfaction des ressources, accélération des nouvelles technologies qui posent des questions humaines, philosophiques, éthiques. Les mutations actuelles vont plus loin que les mutations précédentes, que ce soit le rapport au travail, à la démocratie, à notre planète. Il y a 20 ans, le destin semblait écrit : toujours plus de commerce, de croissance, de démocratie, de libre-échange. C’était l’époque de la mondialisation heureuse. Certes, cette mondialisation a permis à des centaines de millions de personnes de sortir de la pauvreté. Mais notre rêve européen s’est évanoui dans les sables du repli identitaire. L’accélération des échanges a créé des angoisses, des fractures, des peurs. L’écart se creuse entre ceux qui ont tout pour profiter de ce monde, et les autres, ceux qui sont encastrés dans un territoire, pour qui ces opportunités apparaissent comme des menaces. Ce qu’on appelle avec populisme avec mépris doit nous interroger. L’Europe doit être un sujet majeur de notre action dans les mois qui viennent. Dans neuf mois, les peuples européens choisiront leurs représentants. Les entrepreneurs doivent contribuer à la relance de l’Europe face à l’isolationnisme de Trump, face au capitalisme chinois. Nous devons affirmer notre volonté de construire une Europe plus combative et volontaire, qui ne soit pas moins-disante mais plus compétitive, qui soit autant celle des producteurs que celle des consommateurs, qui ne soit ni l’État providence, à bout de souffle, ni une jungle sans foi ni loi.
L’entreprise accompagne les grandes mutations. Avant, c’était l’État – rappelons-nous qu’Internet vient de l’Armée américaine. Aujourd’hui, ce sont les entrepreneurs qui changent le monde. Dans le spatial, les biotech ou la médecine, l’initiative est maintenant du côté de la sphère privée.

Ce sont les entreprises qui vont relever les défis de demain : urbanisation, biodiversité, transition énergétique… Les entrepreneurs doivent accepter leurs responsabilités. Nos concitoyens attendent de nous des solutions, attendent des entreprises qu’elles soient des acteurs du changement sociétal. La liberté et la responsabilité vont toujours de pair. Ce rôle élargi de l’entreprise est attendu par les jeunes générations, qui ont leur propre rapport au travail. Mais si l’on demande aux entrepreneurs de s’engager davantage dans la société, il faut que leur rôle central dans le pays soit célébré, encouragé, qu’on ne parle pas des entrepreneurs que pour pointer les dérives de quelques-uns, car ce sont eux qui osent, qui innovent et qui prennent tous les risques (applaudissements, NDLR).
Il faut accepter une chose que nous refusons depuis 20 ans : transformer le pays au rythme de la transformation du monde. L’accélération des technologies peut rebattre les cartes rapidement. Les monopoles de fait qui nous sont imposés aujourd’hui peuvent être renversés. Le génie français existe toujours. La ligne rouge consiste à ne pas alourdir les charges des entreprises. Les mesures budgétaires annoncées hier (27 août) par Bruno Le Maire (ministre de l’Économie, NDLR) sont un très mauvais signal. La stabilité est en soi une politique fiscale pro business.
Nous préférons les preuves d’amour aux déclarations d’amour !
» Le nouveau président du Medef a appelé le gouvernement à baisser les dépenses publiques, rappelant les mauvais chiffres français : « En 20 ans, la dette est passée de 40 % du PIB à près de 100 %, le taux de prélèvement obligatoire de 42 % à 45 %, et le poids des dépenses publiques de 52 % du PIB à 57 %. Il faut produire un effort sur les dépenses publiques (applaudissements), ce qui ne veut pas dire moins de santé ou de plus mauvaises infrastructures. »

Édouard Philippe : « Faire de la France l’économie la plus attractive d’Europe »

« L’économie française se caractérise aujourd’hui par une montée en puissance de grandes métropoles. L’époque de Paris et du désert français est révolue. Ces grandes métropoles représentent une concentration de richesses, de savoir, bien réelle, qui nous permet de tenir notre rang et d’être compétitifs. Mais il reste des immobilismes préoccupants, quand on se regarde certes, encore plus quand on se compare à nos voisins, en matière d’évolution de la dette publique et de niveau des dépenses publiques. »

Le chef du gouvernement a insisté sur les mesures prises à destination des entreprises et du développement des compétences : « sécurisation du financement du plan d’investissement sur les compétences, pérennisation des allégements de charges, baisse de l’impôt sur les sociétés, que nous ne remettrons pas en cause jusqu’à la fin du quinquennat. Le projet de loi Pacte prévoit un gel des franchissements de seuil jusqu’en 2022, une simplification des procédures de transmission, un guichet numérique unique pour les créateurs d’entreprise, un regroupement des différents registres, une suppression de l’obligation de présentation de l’extrait Kbis, une suppression des doubles frais pour ceux qui sont artisans et commerçants, des alignements des coûts d’immatriculation dans le cas de la reprise d’entreprise. Tout cela sera effectif dès le 1er janvier prochain.
Le besoin principal reste les compétences, pour mettre un terme à un cruel non-sens, un non-sens cruel pour tout le monde. Il n’y a pas un déplacement que je fasse, pas un secteur d’activité (industrie, agricole, service), dans lequel je ne rencontre pas chaque jour, un chef d’entreprise qui me dit : ‘Je ne trouve pas la personne compétente, j’ai du mal.’ On me le dit partout, partout, dans tous les domaines. 9,1 % de taux de chômage, c’est extravagant. On arrive à une surchauffe, à des entreprises qui se limitent dans leurs ambitions, faute de compétences. C’est un gâchis de destinées humaines, et d’initiatives privées. Ce sont les mieux formés qui continuent à se former le plus, et ceux qui en ont le plus besoin y ont le moins recours. Nous allons dresser un diagnostic par filières, métiers et territoires, avec le Plan Emploi Compétences. Nous voulons faire de la France l’économie la plus attractive d’Europe (applaudissements). Cela passe par une complémentarité entre grands groupes et entrepreneurs innovants (…) L’entreprise, c’est une association des complémentaires. On ne pourra pas attirer, fidéliser les jeunes, sur la seule maximisation du profit, dans le monde dans lequel nous vivons, et vers lequel nous allons.
»

Le coût des indemnités journalières (arrêts maladie) a été jugé sévèrement : « Ces indemnités coûtent 10 Md€/an, et augmentent de 400 M€ par an. C’est plus rapide que l’augmentation des dépenses de santé. Entre 2013 et 2016, le développement des arrêts maladies équivaut à un jour de congé supplémentaire : 204 M de journées indemnisées en 2013, 227 M de journées indemnisées en 2016. Quelles sont les causes de cette croissance rapide ? Le vieillissement de la population active ? Les conditions de travail ? Les prescriptions compréhensives ? (applaudissements sur ce dernier point) Il y a un problème global. Il faut éviter que ce développement rapide affecte les investissements dans les hôpitaux, la mise en œuvre de nouveaux traitements, la recherche. »
Autre point soulevé, l’association des salariés, à travers la participation et l’intéressement. « Seule la moitié d’entre eux bénéficie d’un dispositif d’épargne salariale. Et l’actionnariat salarial concerne un nombre restreint de secteurs et d’entreprises. Il faut le diffuser plus largement. » Concernant l’égalité femme / homme au travail, « il n’est pas que salarial, mais aussi sur le plan des responsabilités. Nous ne pouvons accepter ce déséquilibre, cette injustice, cette rémanence d’un monde ancien qui limite notre capacité de croissance ».

Hubert Vialatte / vialatte@lalettrem.net
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